La politique répressive du régime islamique en Iran repose sur le contrôle total de la société afin de préserver le pouvoir politico-religieux. Elle combine répression judiciaire, sécuritaire et idéologique pour éliminer toute opposition réelle ou perçue. Les arrestations arbitraires, les procès inéquitables, la torture, les aveux forcés, les lourdes peines de prison et la peine de mort sont utilisés comme outils de dissuasion.

La liberté d’expression, de la presse, d’association et les droits des femmes, des minorités ethniques et religieuses sont sévèrement restreints. Le régime assimile régulièrement la dissidence politique à des accusations de menaces contre la sécurité nationale, de «propagande contre l’État» ou d’« espionnage ».

Cette répression vise avant tout à instaurer la peur, empêcher l’organisation collective et maintenir la stabilité du régime face aux contestations populaires.

Keshavarz, étudiant exécuté

Le pouvoir judiciaire islamique d’Iran a annoncé, samedi 20 décembre 2025, l’exécution de la peine de mort d’Aghil Keshavarz, étudiant en architecture à l’université de Shahroud, accusé de « espionnage pour Israël ». Selon un rapport de l’agence de presse Mizan, affiliée au pouvoir judiciaire, la famille d’Aghil Keshavarz avait eu vendredi sa dernière visite avec lui à la prison centrale d’Ourmia.

Après son arrestation, Aqil Keshavarz a été soumis pendant une semaine à de violents interrogatoires au centre de détention du renseignement des Gardiens de la révolution à Orumia. Il a été torturé afin d’obtenir des « aveux forcés » concernant l’accusation d’« espionnage pour Israël », puis transféré à la prison d’Evin.

Selon la presse de la république islamique : « La peine de mort d’Aghil Keshavarz pour espionnage au profit du régime israélien, communication et coopération avec Israël, et prise de photos et vidéos de sites militaires et de sécurité d’Iran a été exécutée après validation par la Cour suprême et conformément à la procédure légale. ».

Aghil Keshavarz faisait partie des étudiants arrêtés dans le contexte du conflit militaire entre la République islamique d’Iran et Israël, sous l’accusation d’espionnage. Son dossier a été examiné par la première chambre du tribunal révolutionnaire d’Ourmia, qui a prononcé une condamnation à mort à son encontre.

Cet étudiant de 27 ans a été arrêté lors d’un voyage à Ourmia par des agents de l’Organisation du renseignement des Gardiens de la révolution islamique. Il a d’abord été détenu dans le centre de détention de cette organisation, puis transféré à la prison d’Evin, avant d’être envoyé à la prison centrale d’Ourmia.

La condamnation à mort d’Aghil Keshavarz a été prononcée à la fin de l’été dernier et lui a été récemment notifiée après avoir été confirmée par le tribunal spécial chargé de juger les crimes d’espionnage. Sa famille s’était auparavant abstenue de communiquer des informations sur l’évolution du dossier et la situation de leur fils en raison de pressions sécuritaires.

La répression depuis la révolution islamique 1979

Depuis la révolution islamique en 1979 des milliers d’opposants politiques ont été exécutées en Iran. Des rapports d’Amnesty International et d’autres organisations estiment que des dizaines de milliers de personnes ont été exécutées en Iran depuis la révolution islamique. Par exemple, un rapport historique (sur certaines périodes) mentionne que plusieurs milliers seulement entre juillet 1988 et janvier 1989 (une période d’exécutions massives), ce qui donne une échelle du phénomène, mais ne couvre qu’un seul épisode.

Mais selon les organisations de défense des droits humains, le total cumulé depuis 1979 se chiffre très probablement en dizaines de milliers d’exécutions, compte tenu des données annuelles et des pics historiques documentés.

La politique répressive en Iran constitue une dimension structurelle du totalitarisme religieux politique du régime. Cette politique est justifiée par un pouvoir absolu individuel qui, selon le régime, représente la volonté d’Allah et sa conformité avec l’islam.

Cette politique est régulièrement dénoncée par les organisations humanistes et ainsi des nations unies. Selon le résultat du vote, qui s’est tenu lors de la séance de l’après-midi du jeudi 18 décembre 2025 à New York, L’Assemblée générale des Nations unies a adopté la résolution annuelle sur la situation des droits humains en Iran par 78 voix pour, 27 contre et 64 abstentions.

Cette résolution est consacrée à la question des exécutions. Le texte exprime une inquiétude face à « une augmentation alarmante et significative des exécutions » en Iran, en particulier celles fondées sur des aveux forcés et menées sans le respect des garanties d’un procès équitable.

La résolution souligne que la peine de mort est appliquée de manière disproportionnée en Iran contre les minorités baloutche, kurde et arabe, et que le nombre d’exécutions de ressortissants afghans est également en augmentation.

L’exécution de mineurs, le caractère secret de la mise à mort, le refus de remettre les corps aux familles et l’usage de la peine capitale comme outil de répression des mouvements de protestation figurent parmi les autres points majeurs de cette section. La résolution appelle le gouvernement iranien à s’orienter vers une suspension officielle de l’application de la peine de mort.

La situation des femmes et des filles occupe une place particulière. La résolution condamne explicitement la répression ciblée des femmes — tant dans l’espace public que sur les réseaux sociaux — et considère les lois relatives au port obligatoire du voile, notamment la loi dite de la « chasteté et du hijab », comme une grave menace pour les libertés fondamentales.

Arrestations arbitraires et violences généralisées

Une violence généralisée contre toute la société. Les femmes sont systématiquement contrôlées. L’usage généralisé des technologies de reconnaissance faciale pour contrôler les étudiantes et les femmes, ainsi qu’à l’imposition de sanctions telles que des amendes, la confiscation de biens, la suspension des études, l’interdiction de voyager et même la prononciation de peines de mort. En Iran en outre des phénomènes tels que les féminicides, les « crimes d’honneur », le mariage des enfants et la violence domestique, reflètent d’autres aspects de la violence généralisée dans la société iranienne.

Il est à noter que la situation des minorités religieuses, notamment les bahaïs, les chrétiens convertis, les derviches, les juifs, les musulmans sunnites, les yârsânis et les zoroastriens, est très inquiétante.

L’antisémitisme ainsi que toute forme de négation de l’Holocauste sont également encrées dans la politique de propagande du régime.

Les manifestations de 2021 et leurs conséquences constituent un autre chapitre important de la répression islamique. Le recours à une violence meurtrière contre les manifestants, la torture — y compris les violences sexuelles —, les arrestations massives ainsi que la prononciation de lourdes peines à l’encontre des protestataires, ont été dénoncés par des associations humanistes. Lors de du mouvement « Femme vie liberté » 650 personnes ont été tuées par les forces de répression de la république islamique. Certaines organisations de défense des droits humains ont annoncé qu’il y aurait environ 20,000 prisonniers politiques en Iran.

Le harcèlement des avocats des manifestants, des journalistes, des défenseurs des droits humains et des familles des protestataires est une pratique courante du régime.

Les violations des droits des prisonnières politiques détenues dans le quartier des femmes de la prison d’Evin se sont intensifiées après la guerre de 12 jours, à la suite de changements structurels et de la nomination de responsables sécuritaires à des postes clés. Les femmes prisonnières ont exigé la fin des entraves de la part des autorités pénitentiaires, l’arrêt des violences exercées par les gardiens de prison et la prise en charge de la situation médicale des détenues malades. Les prisonnières ont également demandé une amélioration des conditions d’hygiène et de l’alimentation en prison. Malgré leurs démarches continues, aucune de ces demandes n’a été satisfaite à ce jour, et ces détenues ont été privées de leur droit légal de rencontrer des inspecteurs de l’Organisation des prisons afin de faire part de leurs problèmes, en raison de l’opposition du chef du quartier.

Violation systématique des droits des prisonniers

Selon le rapport des nations unies, Aida Najaflou, qui avait subi une intervention chirurgicale en raison d’une fracture vertébrale, a été renvoyée en prison avant la fin de son traitement et souffre désormais d’une infection grave ainsi que d’un état physique critique. Alors que le médecin de cette détenue a mis en garde contre un risque de paralysie et a demandé une prise en charge médicale spécialisée, le chef du quartier s’est opposé à l’octroi d’une permission médicale. Parallèlement, malgré l’état de santé très préoccupant de cette chrétienne convertie, l’appareil judiciaire a prononcé à son encontre une peine de 17 ans de prison.

La même source informée a également évoqué la situation de Masoumeh Sadr Ashkouri, une détenue atteinte de maladies pulmonaires, respiratoires, cardiaques et motrices. Bien qu’elle respire à l’aide d’un appareil à oxygène et malgré l’insistance du médecin, elle a été privée de permission médicale. Pourtant, selon la loi, elle bénéficie aussi du droit légal à une libération sous caution. Dans ces conditions, la prise en charge des besoins personnels de ces détenues malades — notamment les déplacements en fauteuil roulant ainsi que l’accès à la douche et aux toilettes — est assurée avec l’aide de leurs codétenues.

La décision de libération de Fariba Kamalabadi et Narges Mansouri, deux prisonnières politiques, n’a pas été mise en œuvre depuis plusieurs mois en raison des entraves des responsables de la prison, et ces deux détenues font face à de nouvelles accusations. Selon ces informations, ces deux prisonnières, ainsi que cinq autres personnes, ont été visées par de nouvelles affaires et inculpations pour « insulte au leadership » et « trouble à l’ordre public » en raison de leurs protestations contre le rôle des responsables de la prison dans la mort de Somayeh Rashidi, survenue en prison suite à une défaillance médicale.

Après la guerre de 12 jours, la République islamique a arrêté, jugé et, dans certains cas, exécuté de nombreux citoyens pour « espionnage » ou « coopération » avec Israël. Les autorités de la République islamique ont déclaré qu’après ce conflit, qui a également été accompagné de frappes aériennes américaines sur des installations nucléaires iraniennes, plus de 700 personnes avaient été arrêtées sous suspicion d’espionnage ou de collaboration avec Israël. l’Organisation du renseignement des Gardiens de la révolution islamique a annoncé avoir démantelé, à l’intérieur de l’Iran, des réseaux qu’elle qualifie de « réseaux d’espionnage des États-Unis et d’Israël ».

Le pouvoir judiciaire de la République islamique a déclaré que les personnes exécutées au cours des derniers mois étaient accusées de « moharebeh » (hostilités contre Dieu) et de « coopération avec des États ennemis ». Le terme « moharebeh » d’origine coranique est le fondement juridique et religieux dans l’exécution des prisonniers politiques et des opposants.

Mai Sato, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits humains en Iran, ainsi que des organisations internationales de défense des droits humains, ont déclaré qu’au moins 12 personnes avaient été exécutées cette année en Iran pour « espionnage » et ont exprimé leur inquiétude quant à l’absence de procès équitable dans ces affaires.

Selon des rapports de défense des droits humains, en plus des détenus pour crimes ordinaires, environ 70 prisonniers politiques en Iran sont actuellement exposés à la confirmation ou à l’exécution de la peine de mort, et plus de 100 autres personnes accusées de faits similaires risquent également une condamnation à mort.

Hanna Neumann, membre du Parlement européen et présidente de la délégation pour les relations Parlement européen-Iran, a qualifié l’arrestation violente des défenseurs des droits humains et des journalistes lors de la cérémonie en mémoire de Khosrow Alikordi, avocat décédé à Machhad, de signe « inquiétant d’une intensification de la répression » en Iran, et a demandé la libération immédiate de tous les détenus. Dans une déclaration, Neumann a dénoncé la transformation d’une cérémonie commémorative d’un avocat des droits humains en « opération policière » comme un message clair des autorités de la République islamique, écrivant que cette action montre que le gouvernement iranien est déterminé non seulement à faire taire la voix de la protestation, mais aussi la mémoire collective, la solidarité sociale et même le deuil. Selon elle, l’arrestation de citoyens pour leur présence à une cérémonie funéraire constitue une violation des droits humains fondamentaux et criminalise les formes les plus élémentaires d’humanité.

La présidente de la délégation pour les relations Parlement européen-Iran, en citant plusieurs noms de personnes arrêtées, dont Narges Mohammadi, Aliyeh Matlubzadeh, Sepideh Gholian, Hasti Amiri et Pouran Nazemi, a appelé à la libération immédiate et inconditionnelle de tous ceux détenus pour avoir exercé leurs droits fondamentaux et leurs libertés fondamentales. Shirin Ardakani, avocate de la famille de Narges Mohammadi en France, a déclaré dans une interview à Iran International qu’elle allait prochainement envoyer un rapport au procureur de la Cour pénale internationale pour demander l’ouverture d’une enquête indépendante sur les crimes de la République islamique, y compris la mort suspecte de Khosrow Alikordi, avocat décédé à Machhad. Ardakani, en évoquant la situation du système judiciaire de la République islamique, a déclaré : « L’existence d’une justice indépendante est essentielle, mais une telle justice n’existe pas en Iran. »

Cependant, les défenseurs des droits humains estiment que le nombre de personnes arrêtées depuis le la mort suspecte de cet avocat, dépasse 50, et des sources de défense des droits humains ont publié sur les réseaux sociaux les noms de plus de 30 de ces personnes.

Les caractéristiques de la politique totalitaire

La république islamique est un régime totalitaire chiite qui s’appuie sur la propagande religieuse et une hostilité contre l’occident et Israël d’une part et d’autre part une répression sanglante du peuple Iran et l’opposition. Aujourd’hui le régime religieux de Khamenei est rejeté par 80% de la population et une large partie des iraniens demandent la démocratie et un pouvoir laïque. Mais ce régime incapable de changer renforce sa répression. Cette politique despotique et répressive en Iran présente plusieurs caractéristiques marquantes, qui se manifestent à la fois dans la sphère politique, sociale et judiciaire. Voici une synthèse détaillée :

  1. Répression systématique et ciblée

La répression n’est pas aléatoire ; elle vise des groupes spécifiques tels que les activistes des droits humains, les journalistes, les opposants politiques, les écologistes, les minorités ethniques et religieuses, ainsi que les femmes qui contestent les lois sur le port obligatoire du voile.

Les manifestations publiques et même les actions symboliques, comme des commémorations ou des rassemblements pacifiques, sont sévèrement punies.

  1. Usage de la violence et de la torture

La torture physique et psychologique, y compris les violences sexuelles, est fréquemment rapportée.

Les arrestations peuvent être violentes et les conditions de détention souvent dégradantes.

  1. Procès inéquitables et détentions arbitraires

Les personnes arrêtées pour des motifs politiques ou d’espionnage sont souvent jugées dans des tribunaux spéciaux, avec des procès rapides, sans défense équitable et sur la base d’« aveux » obtenus sous contrainte.

Les condamnations à mort, même pour des mineurs ou des personnes avec des problèmes de santé graves, sont utilisées comme outil de dissuasion.

  1. Criminalisation des droits fondamentaux

L’exercice des libertés fondamentales, comme la liberté d’expression, de réunion ou de culte, est considéré comme un crime.

Participer à des manifestations, exprimer des opinions critiques ou exercer des droits humains peut entraîner des accusations comme « moharebeh » (hostilité contre Dieu), espionnage ou collaboration avec des États ennemis.

  1. Contrôle social et surveillance généralisée

L’État utilise la technologie, comme la reconnaissance faciale, la surveillance numérique et la censure, pour contrôler la population et intimider les citoyens.

Les minorités et les groupes marginalisés sont surveillés de près et souvent stigmatisés.

  1. Instrumentalisation des peines de mort

La peine de mort est appliquée aux opposants politiques et athées et aussi de manière disproportionnée aux minorités ethniques (Kurdes, Baloutches, Arabes, etc.) et religieuses (bahá’ís, chrétiens convertis, etc.).

Elle sert non seulement à punir mais aussi à créer un climat de peur et de contrôle social.

  1. Répression de la mémoire collective et de la solidarité

La répression ne se limite pas aux actions politiques mais s’étend aux manifestations symboliques ou aux expressions de solidarité sociale, par exemple lors des funérailles ou des commémorations.

En résumé, la politique de répression en Iran combine violence physique, intimidation, contrôle social, détentions arbitraires et instrumentalisation du système judiciaire pour étouffer toute opposition et maintenir le pouvoir islamique en place.

Didier IDJADI

Sociologue franco-iranien. Il a enseigné à l’université Sorbonne Paris-nord,  l’université Gustave Eiffel et le CNAM. Chaque semaine, il réalise et diffuse des émissions en persan et en français sur des thèmes variés : droits de l’Homme, révolution sociétale, écologie, philosophie politique, sociologie des religions, critique du Coran et de l’islam, culture persane et géopolitique du Moyen-Orient. Ces programmes sont accessibles sur YouTube, et rencontrent un large écho dans les milieux intellectuels iraniens, tant en Iran que dans la diaspora. Il intervient également régulièrement dans les médias français, les chaines d’info, pour commenter l’actualité iranienne, le nucléaire, ou encore la situation des femmes en Iran. Conférencier dans les institutions et au Sénat français. Il est membre du Comité Laïcité République (CLR). Didier Idjadi est une voix écoutée sur les enjeux liés à la sécularisation, à la religion, à la géopolitique, et à l’avenir démocratique du monde musulman.

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